1 | 1 | | Le 2 juillet 1816, le bâtiment français «La Méduse», en route vers le Sénégal, fait |
| 2 | | naufrage à quelques lieues de la côte d'Afrique. Sur un radeau de 20 mètres de long et7 |
| 3 | | de large se pressent cent quarante-neuf passagers. On n'en retrouvera, douze joursplus |
| 4 | | tard, que quinze, les autres ayant été jetés à la mer ou même dévorés par les survivants. La |
| 5 | | tragédie suscite, en France, une grande émotion. Trois ans plus tard, Géricault reconstitue |
| 6 | | l'événement en un tableau devenu légendaire, et dont l'importance allait se révéler |
| 7 | | capitale pour la peinture de son siècle. |
2 | 8 | | Le peintre aborde un genre nouveau: la relation d'un événement contemporain. En |
| 9 | | choisissant de montrer avec puissance un moment crucial du drame- celui oû les |
| 10 | | naufragés tentent en vain d'alerter l'équipage d'un autre navire, qu'on entrevoit, |
| 11 | | minuscule, dans le fond - il fait d'un épisode tragique de la navigation un authentique |
| 12 | | moment d'histoire. Pour ce la, il pousse le réalisme jusqu'à réunir une immense |
| 13 | | documentation sur le naufrage, et à se faire construire un véritable radeau dans son atelier. |
| 14 | | Il fréquente même la morgue² d'un hôpital parisien pour mieux rendre l'anatomie des |
| 15 | | cadavres. Ce perfectionnisme est d'ailleurs jugé mal sain par les néoclassiques. On relève, |
| 16 | | dans ce chef-d'oeuvre, l'influence de trois maîtres italiens: Michel-Ange pour la puissance |
| 17 | | plastique des personnages, Raphaël pour leur gestuel le dramatique et le Caravage pour la |
| 18 | | lumière crépusculaire. |