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Les champions smicards

Les champions smicards4)



Ils collectionnent les médailles, mais,   même pas la moindre couverture6) sociale», explique Ber-
contrairement aux Bleus5), ils ne roulent pas surnard Bourandy, directeur adjoint du département haut ni-
l’or. L’Express les a rencontrés.veau au Comité national olympique.
Pour mieux s’entraîner, ils ont souvent [id:15211] leurs étu-
Son nom n’a jamais fait rêver personne. Et son visagedes et renoncé, très jeunes, à tout avenir professionnel. En
n’est connu que de ses proches. Eric Le Chanony,athlétisme, par exemple, ils seraient seulement une demi-
31 ans, possède pourtant au moins un point commundouzaine à gagner correctement leur vie. En tennis, activité
avec Zinedine Zidane ou Fabien Barthez desréputée prospère, la richesse est le privilège d’une élite. «De
Bleus. Il est [id:15206]. Sa spécialité: le bobsleigh. Dimancheplus en plus de sportifs professionnels gagnent moins de
14 février 1999, il a obtenu le premier titre mondial10 000 francs par mois, estime Didier Primault, chercheur au
français de l’histoire de la discipline. Un record, un vrai, deCentre de droit et d’économie du sport de Limoges.A ce ni-
ceux qui marquent une carrière.veau de salaire, je leur conseille souvent [id:15212]. Une car-
Champion du monde, donc. Comme les Bleus. Mais la rière peut s’arrêter à tout moment, et la plupart des joueurs
comparaison [id:15207] ce seul titre de gloire. L’argent, Eric Lese trouvent alors au pied du mur.»
Chanony en parle à voix basse. Et le mot fortune le laisse si-Autre réalité cruelle: le sport ne connaît pas [id:15213]. Le
lencieux. «En France, on ne vit pas du bobsleigh», avoue-t-ilcapitalisme y est sauvage, l’individualisme forcené7). Et
dans un soupir. Il le savait. Il n’en veut à personne. L’an passé,l’écart se creuse toujours plus entre les deux extrémités de
sa médaille de bronze aux Jeux olympiques de Nagano, lal’échelle sociale. «C’est le royaume de l’inégalité, remarque
première du bobsleigh français depuis l’invention des JO,l’économiste Jean-François Bourg. Pour pouvoir s’en sortir
n’avait rien changé à [id:15208]. Le titre mondial n’y a rienfinancièrement, il faut passer des contrats publicitaires. Les
changé non plus. Père de famille, Eric Le Chanony bénéficietitres et les médailles [id:15214].» Pour un même niveau de
depuis trois ans d’un contrat d’athlète de haut niveau avec laperformance, le boxeur américain Mike Tyson avouait en
ville de Paris. «Je suis détaché pour m’entraîner, dit-il. Et j’en1996 des revenus 2 000 fois supérieurs à ceux du lutteur fran-
profite pour préparer le professorat de sport. Plus tard,çais Yvon Riemer: 400 millions de francs pour l’un, 200 000
j’aimerais [id:15209].» En attendant, il gagne seulement 6 500francs pour l’autre. Les deux hommes avaient [id:15215] atteint
francs par mois, plus une bourse annuelle de 8 000 francs, ver-le même sommet: un titre de champion du monde.
sée par sa fédération au titre de la préparation olympique.LeL’année suivante, le classement Forbes des plus gros salai-
reste? «Quel reste? ironise-t-il. Je n’ai rien d’autre.»res du sport international révélait que seulement six discipli-
Atypique, Eric Le Chanony? Un oublié de la gloire, arrivénes la boxe, le basket-ball, l’automobile, le football améri-
trop tard, ou trop tôt, le jour de la remise des prix? Sûrementcain, le tennis et le golf - se partageaient 95 des 100 premiè-
pas. Le sport français est ainsi fait. L’inégalité y est lares places. [id:15216]: la présence du joueur de basket Michael
règle. Et [id:15210] y sont des exceptions. L’an passé, ils ontJordan en tête de ce hit-parade de la fortune, en 1994. Cette
été près de 450 athlètes à participer à des championnatsannée-là, il avait pourtant raccroché ses baskets pour goûter,
d’Europe ou du monde dans les disciplines olympiques. Unune première fois, aux délices de la retraite.
tiers d’entre eux, guère plus, vivent confortablement de
leurs performances. «Certains de ces sportifs ne possèdentAlain Mercier, dans «L’Express» du 11 mars 1999

un smicard = iemand die het minimumloon ontvangt
Les Bleus : het nationale voetbalelftal van Frankrijk
la couverture = (hier) de financiële dekking door middel van verzekering
forcené = fanatiek, verwoed