Treize millions de spectateurs ont | | dans son livre L’Egypte, passion fran- |
déjà vu la reine la plus célèbre d’Egypte | | çaise (Seuil), y voit le goût de nos |
tromper Jules César, l’empereur de | | contemporains pour une culture qui a |
Rome, dans Astérix et Obélix. Tout ce | | essayé, avec ses tombeaux et ses |
qui la concerne est historiquement | | momies, de défier [id:53863], et qui a |
exact. [id:53860] le réalisateur a consulté | | réussi, à travers ses mythes et ses |
des spécialistes, dont Guillemette | | dieux, à donner un sens à la vie. |
Andreu, l’égyptologue responsable de | | L’Egypte traverse les siècles et nous |
l’exposition Les Artistes de Pharaon | | parle encore. Car sa civilisation a |
qui s’ouvre cette semaine au Louvre. | | innové dans tous les domaines. Les |
L’extraordinaire vie de Cléopâtre | | mathématiques, pour calculer la taille |
n’est qu’un des multiples prétextes | | des champs après les montées du |
trouvés par les Français pour célébrer | | fleuve. Les poids et mesures, pour |
le pays du Nil. Depuis des siècles, la | | estimer la valeur des récoltes. Les |
France et l’Egypte entretiennent une | | hiéroglyphes, cette écriture si com- |
histoire d’amour. Voyageurs, lecteurs, | | plexe, mise au point au bord du Nil. La |
passionnés d’histoire, amateurs d’art, | | chimie, qui vient de kemos, le mot |
collectionneurs de bibelots ou philo- | | égyptien qui désigne la terre. L’archi- |
sophes vont là-bas par centaines de | | tecture, pour élever des pyramides |
milliers, comme en pèlerinage. | | géantes et édifier d’immenses temples. |
Que cherchent-ils dans ce pays | | [id:53864] aussi joue un rôle capital, car |
coincé entre mer et désert? D’abord à | | seule la préservation du corps garan- |
vérifier qu’il y a encore, sur terre, des | | tissait la vie éternelle. Si les Egyptiens |
paysages [id:53861] et des monuments qui | | connaissaient si bien le corps humain, |
défient le temps. Dès qu’on quitte le | | c’est qu’ils perfectionnaient sans cesse |
Caire, ses bidonvilles et embouteillages, | | les techniques d’embaumement. Plus |
on trouve une nature qui n’a pas changé | | on examine les momies avec les tech- |
depuis des millénaires. Les paysans se | | nologies modernes, plus on est émer- |
rendent encore aux champs assis sur | | veillé par la compétence des médecins |
leurs petits ânes. Sur le Nil, les felou- | | du Nil. Des docteurs souvent magi- |
ques glissent sans bruit, semblables à | | ciens. |
celles des bas-reliefs des temples. Un | | Evidemment, nos musées sont |
envol de canards signale la tombée du | | assurés du succès dès qu’ils mettent en |
jour, comme sur les peintures murales. | | scène les temps pharaoniques. |
Mais il n’y a pas que [id:53862]. Nulle | | Toutankhamon (plus de 1 million |
part l’Histoire n’est aussi obsédante. | | d’entrées), Ramsès II, Aménophis III, |
Quel autre pays impose aux voyageurs | | les rois de Tanis, ils ont tous séduit |
la visite de tant de monuments? Quelle | | Paris. Entre les Français et le pays des |
autre nation donne une image aussi | | pharaons, la passion dure depuis |
sereine de la mort? Quand les touristes | | longtemps. Non sans [id:53865]. Car si les |
descendent dans les tombes, ils | | bords du Nil renferment une telle |
trouvent des évocations idylliques de | | richesse artistique et architecturale, |
moissons, de fêtes, un pays d’êtres | | c’est grâce à d’immenses et discrets |
jeunes et beaux, figés dans un prin- | | artistes. C’est à juste titre qu’une |
temps éternel, où les dieux vous pren- | | exposition étonnante leur rend |
nent par la main après avoir pesé votre | | hommage. |
coeur, et non vos péchés. Robert Solé, | | |