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Pauvre Académie Française

Pauvre Académie Française1)

    dû à l’influence de Mai 68. Il y a aussi
 la peur de ne pas être élu. Quand je
 suggère à certains auteurs reconnus de
 se présenter, ils me répondent: “Est-ce
 que c’est garanti?” Mais je ne peux le
 leur promettre. Je crois que la généra-
 tion montante d’écrivains sera plus
1     «Pourquoi, quand on est quel- empressée de nous rejoindre. Car je
 qu’un, vouloir devenir quelque chose?» suis consciente que l’Académie doit
 En 1878, dans une lettre à Maxime Du accueillir à nouveau des personnalités
 Camp, Gustave Flaubert commente littéraires.» Le désintérêt des écrivains
 ainsi l’entrée d’Ernest Renan à l’Acadé- a amené de plus en plus de représen-
 mie française. Pensent-ils à cette tants d’autres catégories à vouloir être
 superbe réponse, ceux qui aujourd’hui élus à l’Académie, comme l’ancien
 refusent ce qui n’est peut-être plus un président Giscard d’Estaing, ou le
 si grand honneur? Modiano, Le Clézio, médecin célèbre Yves Pouliquen.
 Quignard, Echenoz, Kundera ont été3     «L’Académie est un club de vieux
 approchés en vain. Pourquoi en effet messieurs sympathiques et craintifs
 céder à cette comédie sociale? Pour- qui ne veulent pas d’histoires, constate
 quoi se retrouver dans un groupe qui l’écrivain Jean Raspail. Ce que je
 ne compte pas d’écrivains reconnus?» regrette surtout, c’est que leur travail
 Aujourd’hui, l’Académie a bien besoin sur la langue, fondement de l’Acadé-
 de recruter. Car, désormais sept sièges mie, en souffre. Elle ne joue plus son
 sont vacants et l’âge des académiciens rôle. Je ne l’ai pas entendue protester
 est bien avancé (moyenne 79 ans). contre la féminisation des termes, par
2     La plus vieille institution de France exemple. Et puis, deux signes de déclin
 est-elle démodée? Hélène Carrère ne trompent pas: la liste des prix de
 d’Encausse, la secrétaire perpétuelle, l’Académie n’est plus publiée et les
 nie la crise, mais admet la double journalistes ne viennent plus suivre les
 nécessité de rajeunir l’assemblée et de séances.»
 la recentrer sur la littérature. «Je sais4     Si elle n’est plus un club de grands
 que des écrivains reconnus ne sou- écrivains, qui donc l’Académie doit-elle
 haitent pas nous rejoindre. Il y a dans accueillir? Des politiques aux méde-
 la génération des 60-70 ans un refus cins, doit-elle devenir une simple
 global de toute institution, sans doute vitrine de l’excellence française?