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Catherine Destivelle

Catherine Destivelle

Celle que l’on a surnommée la «grimpeuse aux mains nues» n’a pas l’intention de poser ses bagages, même
si, depuis 1997, la naissance de son enfant lui a un peu enlevé le goût des expéditions trop lointaines…


   - Vos escalades vous ont amenée aux quatre coins   
du monde: Népal, Utah, Mali, Sinaï… Associez-vous
toujours le voyage à l’alpinisme?
   - A l’alpinisme ou au trekking, peu importe, mais
j’ai en effet toujours besoin d’une raison. Parce que j’y
ai goûté, je ne vois pas d’autres façons de _[id:16352]_.
Plus que la découverte d’un endroit, c’est la rencontre
d’autres gens qui m’intéresse. Grimper permet des ren-
contres beaucoup plus riches, beaucoup plus appro-
fondies. Le contact est permanent _[id:16353]_ j’ai besoin
de l’aide des habitants de la région pour être guidée,
logée, nourrie, etc. Partager enrichit la relation: les
gens sur place suivent le projet, ils ont envie, eux
aussi, que nous réussissions.
   - Enfant, aviez-vous déjà envie de grimper?
   - Absolument pas. Je voulais ressembler à Heidi, la
petite fille qui vit en montagne avec son grand-père.
Mes parents nous emmenaient tous les étés en Suisse.
Mes quatre soeurs, mon frère et moi, nous aidions les
paysans à ramasser les foins, à traire les vaches...
Pourtant, c’est en forêt de Fontainebleau, où nos pa-
rents nous accompagnaient le dimanche, que j’ai fait
pour la première fois _[id:16354]_.
   - Vous faites des montées en solo et en duo.
Découvre-t-on plus de choses sur soi-même en solo?
   - Dans les deux cas, c’est un voyage très personnel.
Mais à deux, il faut par exemple faire attention aux
chutes de pierres qui pourraient blesser celui qui est en
dessous, alors que seul, on n’a pas à s’en préoccuper.
En duo, je grimpe toujours avec mon mari et souvent
je _[id:16355]_ de lui! S’il s’aventure dans un endroit un   - La naissance de votre fils, en décembre 1997,
peu difficile, je me dis «Pourvu qu’il n’arrive rien».n’a-t-elle pas en partie annoncé la fin d’une vie de
Seule, je ne me fais jamais des soucis, je suis sûre d’yvoyages?
arriver. J’ai vraiment horreur de voir des gens monter   - J’ai beaucoup voyagé en Europe avec lui, notam-
en solo, j’ai peur qu’ils tombent!ment lors d’une série de reportages pour Paris-Match
   - Lequel de vos nombreux voyages vous a le plusqui nous a amenés en Grèce, en Espagne et en Italie.
marquée?_[id:16358]_ je ne suis pas partie en expédition depuis qu’il
   - A chaque fois, ce que j’en garde est très _[id:16356]_.est né. Je n’en ai plus tellement envie, je ne veux pas
Aux Etats-Unis, j’ai été impressionnée par les grandsle laisser seul. Si je retourne au Népal, par exemple, ce
espaces, j’aime le désert, en particulier celui de l’Utahsera avec lui, pour lui faire découvrir cette région du
avec ses tours de grè¹ à escalader. Au Népal, j’appré-monde et ses habitants. Mais nous ne serons pas
cie l’ouverture des gens, leur hospitalité.obligés de grimper, faire un trek serait bien.
   - Vous est-il arrivé, lors d’une escalade - en parti-   - Etes-vous attirée par la perspective de faire des
culier en janvier 1996 lorsque, au pôle Sud, vous avezvoyages interplanétaires, d’escalader un jour les
fait une chute de 25 mètres - de vous dire que vouscratères de la Lune?
auriez mieux fait de _[id:16357]_?   - Je suis bien sur Terre, je n’ai pas _[id:16359]_ pour
   - Jamais. A ce moment-là, j’avais fait une bêtise,aller là-haut. J’ai encore plein de choses à faire ici, je
j’ai perdu l’équilibre dans la pente, c’est un peune vois pas pourquoi j’irais découvrir une autre
ridicule. C’est vrai que ça m’a choquée énormément:planète. J’ai les pieds sur terre.
ce n’était pas l’endroit pour avoir un accident. Mais je
ne regrette jamais d’être partie.propos recueillis par Corinne Renou-Nativel,
dans «Vacances Bleues Magazine» n0 20


¹ du grès = gres, zandsteen