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Patricia Kaas

Patricia Kaas
Amour, succès,
mademoiselle
n’a plus le blues

Son nouvel album prend un bel envol, sa tournée la
mènera jusqu’à Helsinki, Tokyo, Berlin et Séoul... Elle a
beau chanter les passions malheureuses, la vie sourit,
décidément, à la petite cigale de l’Est.


1    Le Figaro Magazine - Vous semblez bien dans vo-    La chose la plus importante dans la vie, c’est l’hon-
 tre peau. Le propre d’un artiste qui chante ce genre55 nêteté et l’amour. J’ai été élevée avec ces principes.
 de chansons n’est-il pas l’expression d’un certain mal- Mais reconnaissons que l’argent est un plus au bonheur.
 heur? Quand on commence à en gagner beaucoup,
5 P.K. - Non, car être interprète c’est un peu aussi certains problèmes apparaissent : tout le monde en
 comme dans un film, jouer le rôle de quelqu’un. C’est veut et les procès commencent.
 aller au fond des mots. Le fait d’avoir commencé à660    F.M. - On se protège comment ?
 chanter très jeune m’a donné beaucoup d’expérience P.K. - On met fin à ces fausses amitiés et si les
 et cela se ressent dans la voix. Peu importe que le problèmes vont plus loin, il faut avoir recours à des
10 texte soit joyeux ou pas, j’arrive à lui donner une cer- avocats.
 taine émotion. Je chante facilement l’amour impossi-7    F.M. - Dans votre carrière, les choses mettent du
 ble, l’amour difficile et pourtant, aujourd’hui je vis un65 temps à s’installer et à devenir importantes.
 bel amour. P.K. - Pour le compact Mademoiselle, sorti en avril
2    F.M. - Des rumeurs prétendent que dans votre 1987, les médias - qui font les succès - disaient :
15 carrière vous traversez une période de crise. Les chif- « Intéressant, mais pas commercial. » A l’époque ma-
 fres prouvent le contraire. Quelle impression cela man était malade et je voulais lui montrer que je pou-
 vous fait-il d’entendre ce genre de commentaires ?70 vais me battre. Donc, j’ai fait toutes les radios. J’arri-
 P.K. - Dans une carrière il y a des hauts et des bas. vais seule avec mon disque pour le passer et le public
 En ce qui concerne ces rumeurs, il faut voir comment m’a adoptée. Le plus drôle, c’est que cette chanson
20 elles sont interprétées. Ceux qui disent « Patricia dormait dans un tiroir et avait été proposée à d’autres
 Kaas n’a plus de succès » ne sont pas renseignés. Cet chanteuses.... personne n’en voulait. Moi, je la trou-
 album a mis plus de temps pour s’adapter auprès des75 vais sympa avec son texte un peu facile, un peu cli-
 gens, c’est vrai. Mais maintenant, il marche bien. ché. J’étais adolescente, je sortais d’une petite ville,
3    F.M. - A la suite d’un malentendu, la presse a ra- et il me correspondait beaucoup.
25 conté qu’un bébé était programmé. N’est-ce pas péni-8    F.M. - Etes-vous plus perfectionniste qu’autrefois ?
 ble de voir sa vie la plus intime ainsi mise en avant ? P.K. - Oui, je suis même plus exigeante, mais c’est
 P.K. - Non, plus aujourd’hui. Au début, quand il y80 normal. Avec le temps, j’ai envie d’être de plus en
 avait des mensonges, cela me choquait. J’avais l’im- plus proche de ce que je fais. Un luxe qu’on peut se
 pression que tout était écrit à l’avance et que les mé- permettre quand on a eu du succès. Je deviens plus
30 dias savaient avant moi ce que j’allais faire. C’est vrai perfectionniste.
 que j’ai envie d’avoir des enfants. Donc, qu’on me le9    F.M. - Est-ce qu’un artiste se pose souvent la
 prédise à la fin de l’année, peu importe... D’autant85 question : « Pourquoi le public m’aime-t-il autant,
 plus que les deux ou trois journaux qui ont annoncé pourquoi est-il fasciné par ce que je fais ? »
 cette venue n’ont pas la réputation de vérifier leurs in- P.K. - Je partage ma musique. J’ai rencontré des
35 formations. Mais je n’accepte pas, et même j’attaque jeunes qui tremblaient ou pleuraient en me voyant,
 lorsqu’un mensonge est lié à la mort d’un proche, mais ça ne me fascine pas. Je me demande pourquoi
 comme cela m’est arrivé.90 ils réagissent comme cela et ça me fait de la peine
4    F.M. - Cela vous a-t-il été difficile de retrouver la qu’ils se mettent dans cet état-là.
 morale après le décès de vos parents ?10    F.M. - N’êtes-vous pas fatiguée par la légende de
40 P.K. - A l’époque de la mort de ma mère, j’étais la petite fille qui a réussi ?
 peut-être trop jeune pour comprendre qu’il ne faut pas P. K. - Non, je ne veux pas faire une croix sur mon
 être égoïste : elle souffrait mais je voulais la garder95 passé, c’est la période où j’ai le plus appris. La meil-
 près de moi. Je lui demandais de se battre, mais à la leure école pour chanter reste la jeunesse. Je crois
 fin, j’ai pensé : « Elle souffre, laisse-la partir. » C’est qu’à partir du moment où l’on passe à la télé, ça fait
45 vrai que mes parents me manquent. Mon père était rêver les gens. Je ne veux pas enlever ce rêve. Je
 quelqu’un de très touchant, de très marrant, il me fai- suis une chanteuse, j’aime mon métier, je suis heu-
 sait penser à un petit clown avec son sourire et ses100 reuse de le faire, je suis heureuse de le partager, je
 yeux qui brillaient. Il n’était pas très ouvert, il parlait déteste le mot star, mais c’est beau de laisser rêver
 peu, ses yeux parlaient pour lui.... les gens.
550    F.M. - Vous avez gagné beaucoup d’argent au 
 cours de ces années, tout en restant simple. Est-ce à Fragments d’une interview de François Delétraz avec
 cause de la peur du lendemain ? Patricia Kaas, dans « Le Figaro Magazine », janvier
 P.K. - Parfois l’argent change les gens, c’est vrai.105 1998