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Voici pourquoi les routes françaises tuent davantage

11     «L’automobiliste français n'est pas totalement différent de l'automobiliste anglais,
2 hollandais ou allemand», déclare Yvon Chich, directeur chargé de mission pour la sécurité
3 de l'Institut national pour la recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS).
24     Autrement dit, il n'y a pas de fatalité en matière de sécurité routière: si l'on se tue
5 davantage au volant en France qu'[id:46292], ce n'est pas dû au caractère des Français. Pour
6 preuve: en 1972, on recensait 280 000 blessés et 17000 morts sur les routes. Mais en 1991,
7 on a dénombré 148000 blessés et 9 000 morts. C'est [id:46293], mais les chiffres ont donc
8 diminué de presque 50% en vingt ans. Alors que le pare automobile a doublé dans la
9 même période et que de plus en plus de gens savent conduire: aujourd'hui, 33 millions de
10 Français [id:46294].
311     Parfois, une simple mesure explique cette amélioration de la sécurité routière.
12 [id:46295]: la limitation de vitesse à 50 km/h dans les agglomérations entrait en vigueur il y a
13 dix-huit mois. Ce simple passage de 60 à 50 km/h a fait diminuer de 18% la mortalité dans
14 les accidents en ville. Quant à cela, nous ne sommes pas une exception, car les Suisses et
15 des Danois, qui nous avaient précédés dans ce domaine, ont obtenu exactement les mêmes
16 résultats. En fait, certains comportements sur la route ne dépendent pas tellement de la
17 responsabilité des [id:46296] mais plutôt de celle de l'Etat.
418     Pourtant, il faut dire qu’il y a quand même quelques différences entre les Français et
19 les autres. Qu'on le veuille ou non, les Français n'ont pas exactement les mêmes
20 comportements vis-à-vis de la loi que les Anglo-Saxons ou les Scandinaves. Nos
21 concitoyens ne reconnaissent pas toujours sa légitimité, se sentent parfois au-dessus de la
22 loi et [id:46297] les mesures de sécurité sur les routes. Le conducteur français réagit peut-
23 être de façon plus sensible, plus «macho» que l'Allemand ou l’Anglais.
524     Et puis, il y a encore d'autres différences entre les pays européens. La Grande-
25 Bretagne, par exemple, est un pays plus petit que la France, plus urbanisé, dont la densité
26 de population est plus importante. C'est pour cela que l'on dénombre moins d'accidents
27 mortels que chez nous. C'est très étonnant, mais il faut savoir (autoroutes mises à part)
28 que plus les routes sont larges, droites et [id:46298], plus les risques d'accidents
29 augmentent. En effet, les conducteurs ont un sentiment de liberté et de confort qui les
30 encourage à la vitesse. [id:46299], des rues étroites, une certaine animation ou des obstacles
31 répétés diminuent le nombre d'accidents graves.
632     Il en va de même pour les voitures. Il faudra dire un jour ouvertement que les
33 voitures très rapides sont plus difficiles à conduire que les autres. Tous les assureurs savent
34 qu'une telle voiture augmente de 180% le risque d'accident par rapport à une voiture du
35 même type, mais [id:46300]. Et quand on voit, au Salon de l'auto, qu’on expose encore des
36 voitures qui montent à plus de 200 km/h, on ne peut plus maintenir que tout le monde est
37 pour la sécurité sur nos routes. La sécurité sur la route c'est avant tout une bonne
38 formation, beaucoup d'argent dépensé par l'Etat pour informer les citoyens. En plus, les
39 automobilistes doivent [id:463001] certaines «satisfactions» comme la vitesse ou l'alcool.
 
     «Le Figaro-Magazine» du 11 juillet 1992