| | pour toi? |
| -Oui. Quand Sébastien m’a raconté quel était |
| son problème, cela m’a paru tout à fait naturel |
| d’aller voir la directrice. Sébastien, lui, ne voulait |
| pas. Il avait peur de ses agresseurs³. Je lui ai |
| promis que personne ne le toucherait s’il venait |
| avec moi. |
| -Et toi, tu n’es ni très grand, ni très fort. Tu ne |
| crains pas d’être victime à ton tour? |
| -Pas du tout. Je n’ai [id:15928] de personne. Les |
| agresseurs³ de Sébastien ne me toucheront pas. |
| Ils savent que s’ils me causent des problèmes, |
| mes frères me défendront. |
| -Et avec la directrice, ça s’est passé |
-Okapi: Abdelali, tu as osé dénoncer¹ les | | comment? |
violences dont Sébastien, un élève de ton | | -Elle nous a tout de suite reçus dans son |
collège, était victime. Comment l’as-tu | | bureau. Mais Sébastien s’est bloqué à nouveau, il |
découvert? | | avait du mal à [id:15929]. Alors, je l’ai aidé à raconter |
-Abdelali: C’était un jeudi matin et j’allais en | | toute son histoire. Tout de suite, la directrice a |
cours de sport. J’ai vu Sébastien qui pleurait dans | | compris que c’était très grave. Elle a alerté le |
le couloir. Je lui ai demandé ce qui n’allait pas. | | médecin scolaire, puis elle m’a demandé |
D’abord, il m’a dit qu’il n’avait rien. Seulement j’ai | | d’accompagner Sébastien chez lui. Là, le médecin |
vu qu’il était blessé au visage. Alors j’ai insisté et | | a entendu et examiné Sébastien, [id:15930] je n’étais |
c’est là qu’il m’a expliqué qu’on l’avait [id:15925]. | | pas présent. C’était un entretien secret. |
Quand je lui ai demandé si c’était la première fois, | | -Qu’est-ce qui a changé pour toi depuis cette |
il m’a répondu que cela durait depuis le début de | | histoire? |
l’année. Alors, je l’ai emmené chez la directrice. | | -Quand la télé a commencé à en parler, tout le |
-Tu savais donc tout de suite que la situation | | monde est venu pour [id:15931]. Le lycée, les |
était très grave? | | copains de mon quartier, mes camarades de |
-Non, pas vraiment. Je n’ai pas du tout imaginé | | classe… On m’a surnommé «le héros». Même la |
que Sébastien avait reçu tant de coups². Je ne | | ministre de l’Education nationale m’a écrit une |
savais pas que ses agresseurs³ étaient si [id:15926]. | | lettre pour me féliciter. La maman de Sébastien |
Quand je suis entré en action, j’ai cru que c’était | | m’a offert un cadeau pour me remercier. Un prof |
la première fois qu’on battait Sébastien. Je le | | m’a dit qu’il n’y avait pas beaucoup de personnes |
connais seulement de vue. Comme nous ne sommes pas | | qui auraient fait la même chose. J’ai fait un truc |
dans la même classe, nous ne parlions pas beaucoup | | bien, mais c’est normal. |
ensemble. Je savais juste qu’il avait du mal à | | |
s’intégrer, surtout à cause de ses difficultés à | | d’après Yan Gauchard, dans «Okapi» du |
parler. | | 12 février 2000 |
-Dénoncer¹ cette violence, c’était [id:15927] | | |