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Tahar Ben Jelloun

Tahar Ben Jelloun

A 43 ans, l'écrivain marocain Tahar Ben Jelloun a reçu le prix Goncourt 1987 pour son
roman «La nuit sacrée ». Dans son appartement parisien, il a reçu nos reportes
Jean-François Chaigneau et Jean-Claude Deutsch.


11     Ce prix Goncourt va-t-il changer votre vie?
2 - Je ne le crois pas, parce que je continuer ai à écrire. Et tant que j'écrirai , rien ne
3 sera jamais très différent. J'avais déjà un public qui achetait régulièrement mes livres.
4 Avec ce prix, ce public va de venir plus grand, mais je ne pense pas qu'il rester a aussi
5 nombreux.
26     Pourquoi avez-vous choisi d'écrire en français ?
7 - Chez moi , au Maroc, on parlait l'arabe à l'école primaire et on écrivait en
8 français. Quand j'étais petit, je pensais que la langue arabe était faite pour parler chez soi
9 et dans la rue et le français pour écrire des livres. Alors naturellement, j'ai commencé à
10 écrire en français. Pour moi c'était plus facile. D'autant plus que l'arabe que nous
11 parlions à la maison est très différent de l'arabe c1assique, celui du Coran", que j'écris
12 mal.
313     En quelle langue les idées et les mots vous arrivent-ils ?
14 - Tout cela se mélange, sans système, en deux langues, puisque je suis parfaitement
15 bilingue" . Au Maroc, beaucoup de gens de ma génération sont comme moi. Il n'était pas
16 besoin d'être enfant de riches pour cela . D'ailleurs, je ne l'étais pas. Mon père avait un
17 tout petit magasin de tissus à Tanger. Et mon plus grand souci était de ne pas redoubler
18 ma classe, sinon il m'aurait enlevé de l'école.
419     Avez-vous connu la pauvreté ?
20 - Mes deux frères, ma soeur et moi nous avons toujours eu assez à manger et nous
21 avons été vêtus correctement. En cela, nous n'avons manqué de rien, je veux dire rien de
22 l'essentiel. Mais nous n'avons jamais été gâtés comme le sont les enfants d'aujourd'hui.
523     Pourquoi êtes-vous venu en France ?
24 - J'étais professeur au Maroc, mais je voulais passer un doctorat de psychologie.
25 C'était en 1971. Je n'avais pas de bourse d'études mais j'ai obtenu une aide de
26 l'association « La vie nouvelle » de 500 francs par mois. Très vite j'ai publié des poésies.
27 Et un premier roman a suivi en 1973. J'ai aussi travaillé comme journaliste. Pendant
28 quelques années, j'ai été très occupé entre les études, les articles de journaux et les livres.
629     Avez-vous pensé à prendre la nationalité française ?
30 - Non, j'ai une carte de séjour pour dix ans. Je tiens beaucoup à mon passeport
31 marocain, que je trouve très digne, et je n'ai pas envie de le changer. Je n'ai pas besoin
32 d' un passeport du pays dans lequel j'habite pour prouver que j'ai du respect pour ce
33 pays. J'aime et je respecte la France. Je le montre par tout ce que je fais ici.
734     Après ce succès, comment pensez-vous être accueilli au Maroc?
35 - Mon père et ma mère vivent toujours là-bas, ils sont très fiers de ma réussite.
36 Mon père a lu tous mes livres, mais ma mère est malheureusement analphabète. L'une
37 des choses que je regrette le plus est que je n'ai rien fait pour lui apprendre à lire et à
38 écrire. Alors mes livres, je les lui raconte. Et elle en est ravie .


d'après «Paris Match» du 27 novembre 1987

Le prix Goncourt : de belangrijkste literaire prijs in Frankrijk, die ieder jaar wordt uitgereikt
Le Coran = de Koran : het heilige boek van de Islam
bilingue = tweetalig